Il est peut-être très exotique de parler d’un voyage à la Tour Eiffel, aux Îles Fiji, en Grèce, aux pyramides, et en des centaines de lieux historiques et de grande beauté à travers le monde, mais nous avons chez nous, ici au Québec, des endroits merveilleux à voir. Parmi ceux-là, nos centrales électriques, dont le complexe Manic-Outardes et le complexe Robert-Bourassa, qui n’ont rien à envier à qui que ce soit.
La plupart des québécois savent très peu de choses sur Hydro-Québec et sur ses installations, alors qu’il y a tellement à dire et à voir chez cette société appartenant à l’ensemble de la population. Pas étonnant que bon nombre de financiers et d’investisseurs tentent par toutes sortes de moyens de convaincre la population que cette Société d’État devrait être privatisée, en tout ou en partie… Qu’on devrait vendre l’électricité à sa valeur d’utilité et non pas au prix de faveur dont nous bénéficions présentement. Cette réflexion donne une idée de ce qui se passerait s’il y avait privatisation, ne serait-ce que partielle, un jour.
Question de sites intéressants à visiter, Hydro-Québec offre la possibilité de visiter une douzaine de centrales à travers la province, en plus de l’électrium de Ste-Julie, en Montérégie, de la Cité de l’énergie, à Shawinigan, et du siège-social, à Montréal. Il n’y a que l’embarras du choix. C’est gratuit, donc à la portée de toutes les bourses. De quoi passer des vacances inoubliables, que ce soit dans notre propre région, ou au loin.
Le complexe Manic-Outardes offre la possibilité de visiter deux centrales qui sont des monuments uniques au monde de par leur construction et de par leur architecture. À quelque 1 150 kilomètres de Montréal. Beaucoup à voir en cours de route, en traversant des régions bien développées, puis en longeant le Fleuve St-Laurent sur de longues distances, traverser Charlevoix et une partie de la Côte-Nord. À partir de Baie-Comeau, quelque 215 kilomètres de route en continuel serpentin, à travers côtes, vallons et montagnes. Le temps pressait lorsque le gouvernement Duplessis a donné le feu vert au projet en 1959 et on a alors simplement construit une route sans prendre le temps de dynamiter des caps de roche ni de remplir des ravins et vallons. Faire vite était plus important que construire une infrastructure intéressante.
Le gigantisme de Manic-5, barrage Daniel-Johnson, impressionne à coup sûr, surtout lorsqu’on constate que l’arche principale, d’une hauteur de 214 mètres, pourrait recevoir la Place Ville-Marie avec ses 42 étages et ses 188 mètres de hauteur, et il restera de l’espace pour ajouter six autres étages à la Reine de Montréal. Quant à Manic-2, barrage Jean-Lesage, c’est d’abord et avant tout les techniques de construction qui impressionnent.
Aménagement Robert-Bourassa
À 1 440 kilomètres de Montréal, à Radisson, se trouve la plus grande centrale souterraine au monde : LG2, d’une capacité de 5 616 MW; c’est trois fois et demie plus que Manic-5. Colossal vous dites? C’est tout simplement époustouflant de constater tout le génie qui a dû être déployé pour construire ce joyau du parc d’Hydro-Québec. L’aménagement Robert-Bourassa fournit 20% de toute l’électricité du Québec.
La profession d’ingénieur en a pris pour son rhume au cours des derniers mois avec la Commission Charbonneau mais une visite comme celle à la centrale Robert-Bourassa, de l’aménagement du même nom, a de quoi réconcilier les plus récalcitrants à la profession d’ingénieur. Tout ce qu’il faut prévoir pour que tout fonctionne tel que prévu, continuellement, 24 heures par jour, 365 jours par année; il y a maintenant plus de 35 ans. C’est en fait un musée de la technologie.
S’y rendre par avion est une excellente idée. Contrairement à la route vers le Complexe Manic-Outardes, il y a de très grands espaces inhabités entre Montréal et Radisson. Cependant, parcourir le trajet en véhicule automobile permet de voir des choses qu’on ne voit nulle part ailleurs. La route Mont-Laurier-Val d’Or, particulièrement la réserve faunique de La Vérendrye, est une longue succession de super beaux paysages de nature, avec bon nombre de points d’observation, souvent au bord de lacs majestueux. Et pour les personnes prévoyantes, l’acquisition d’un permis de pêche permet de taquiner une abondante population de différentes espèces de poisson.
De Val d’Or à St-Félix-de-Dalquier, environ 85 kilomètres, c’est une succession de petits villages, à l’exception d’Amos qui compte près de 13 000 citoyens. De St-Félix à Radisson, environ 785 kilomètres, ce n’est que lacs et forêts, avec un oasis nommé Matagami, à 165 kilomètre de St-Félix. Passé Matagami, ce sont 620 kilomètres de forêt, parfois désertique suite aux feux de forêt et à des étendues de taïga. Un seul point de ravitaillement, à 381 km de Matagami et 239 km de Radisson, où l’essence régulière se vend aux environs de 25 cents de plus le litre que dans les Laurentides ou qu’à Val d’Or ou Amos.
Le paysage y est parfois désolant, mais en d’autres endroits c’est tout simplement à couper le souffle; il faut avoir vu les cascades de la rivière Rupert, tout près de la route et accessibles par une halte routière et des sentiers aménagés!
Pareil voyage se complète par une visite de la centrale LG1, située entre le village de Radisson et la Baie James. Autre très belle centrale à visiter, construite au fil de l’eau plutôt qu’à partir de grands réservoirs. Cette centrale est considérée comme un joyau d’harmonisation avec la nature. Rendu là, il ne reste qu’une courte route à parcourir, très belle route d’ailleurs, pour se rendre au village de Chisasibi, dernière localité avant d’atteindre la Baie James. Et tant qu’à y être, s’y tremper les pieds. L’eau y est d’une température voisine de la glace…! Parmi les attributs particuliers de la région, il y a le soleil qui tarde vraiment à se coucher; au soir de la St-Jean-Baptiste, il faisait encore jour à 22h30 et il y avait toujours une lueur au nord-ouest passé minuit. Ce même soleil s’empresse de montrer le bout du nez à nouveau peu après 3 h 30 du matin.
Tant de choses à voir, à apprendre, à apprécier. Une excellente façon d’apprécier davantage encore notre trésor national qu’est Hydro-Québec. Et dire qu’il reste plusieurs milliers de rivières au Québec qui ne sont d’aucune façon le siège d’installations hydroélectriques. Oui, une telle vacance vaut bien des visites outre-mer, de lieux consacrés au tourisme.
Seule ombre au tableau : la route de la Baie James, de Matagami à Radisson. Cette route de 450 milles, construite en 450 jours disait-on, était reconnue comme étant la plus belle du Québec, surpassant plusieurs autoroutes en qualité et solidité. De très longues distances en ligne droite, où la vitesse permise est de 100 km/h, construite pour supporter d’énormes charges. Sous la responsabilité de la SEBJ, son entretien fait cruellement défaut. Le gouvernement y investit très peu, tout juste assez pour déneiger pendant le très long hiver.
La SEBJ doit y investir des deniers, en fait ceux d’Hydro-Québec, ce qui constitue une forme d’injustice : plusieurs mines y exploitent des gisements et ne contribuent d’aucune façon à l’entretien de la route. Il faut admettre que les camions des mines voyageant sur ces routes ont leur mot à dire dans l’usure et le dépérissement du pavage. En fait, le fond de la route est très solide et il suffirait de refaire le pavage et de défricher des corridors de chaque côté de la route afin d’éviter les collisions avec les animaux.
Les administrateurs auraient probablement avantage à concevoir la première route payante du Québec. Si on exigeait un 10$ pour les autos et un 20$ pour les camions, il y aurait probablement peu de critique. En attendant, cette route brasse plus que plusieurs manèges de parcs d’amusement et il est difficile d’y maintenir une vitesse moyenne de plus de 85 km/h, même s’il est permis de rouler à 100km/h.
Malgré tout, un voyage à faire, absolument. Surtout pour quelqu’un qui gagne sa vie avec l’électricité.
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