Il y a quelques années, tout le monde parlait de la métamorphose de Los Angeles. C’était quelque part la fin d’une ère et le début du Royaume des DEL. C’était la première grande ville nord-américaine qui convertissait son éclairage de rue. Les manufacturiers jubilaient. Les protecteurs du ciel étoilé réalisaient qu’une nouvelle problématique naissait avec l’installation de la nouvelle technologie.
Et voilà qu’une autre décision ramène L.A. à l’avant-scène : « Los Angeles ties its LED streetlights into the web » (Los Angeles connecte ses lumières DEL de rue en réseau), titrait Mark Halper en avril 2015 pour Lux Magazine. Le résumé de son article dit: Los Angeles est en train de doter chacun de ses 110 000 luminaires de rue (valeur questionnée par l’auteur, car la conversion avait été annoncée pour 155 000 des 210 000 lampadaires) avec des « chip » pour pouvoir les gérer individuellement via internet ; pour lire en entier, cliquer ici.
Au-delà de l’impressionnant déploiement de ressources – ajouter des puces à 110 000 luminaires, c’est tout un projet! – il faut visualiser le système qui est capable d’intégrer et contrôler tous ces points (un lampadaire = une puce = un point). Car même si au début la Ville de L.A. se contentera uniquement de surveiller la consommation d’électricité et l’entretien des lampadaires, l’intention est d’aller plus loin : des lampadaires qui clignotent pour montrer aux policiers, pompiers, ambulanciers, le chemin vers les urgences, des lampadaires qui échangeront, avec le réseau, des informations sur le trafic, la sécurité publique et la qualité de l’air, etc.
Encore en avril, les participants aux conférences MCEE à Montréal ont eu l’occasion d’entendre Isabelle Lessard, ingénieure, parler du « Montréal intelligent ». Dans sa présentation, elle exposait le programme de conversion de 132 500 luminaires vers les DEL, dans le contexte de la ville « surdouée » :
Système intelligent de gestion de l’éclairage :
- Connaitre exactement la consommation;
- Gérer efficacement l’inventaire;
- Intervenir immédiatement en cas de bris ou de mauvais fonctionnement;
- Permettre une meilleure planification de l’entretien et connaitre la durée de vie résiduelle des luminaires;
- Détecter le vol de câbles de cuivre;
- Modifier les niveaux d’éclairage lors d’évènements ou d’absence de circulation;
- Autres (capteurs qualité d’air, état d’avancement du déneigement, etc.).
Et la conclusion était une des plus stimulantes possible : « Pour la suite… seule notre imagination peut nous arrêter! ». Pour consulter la présentation complète d’Isabelle Lessard, cliquer ici.
En juin, le même Mark Halper écrivait sur Kansas City : « La plateforme d’éclairage intelligent de Cisco et Sensity transforme chaque lampadaire dans un nœud sensoriel d’un puissant réseau sans fil à bande large […] Cette solution convertit l’infrastructure d’éclairage d’une ville dans un réseau de capteurs qui collectent des données en temps réel pour les applications propres aux villes intelligentes comme le stationnement, l’éclairage, les statistiques commerciales et la sécurité publique ».
Et voilà comment une simple discussion sur l’éclairage se transporte sur un autre territoire : puces, capteurs, échange d’information, nœud, réseau sans fil, contrôle à travers internet. Et c’est de plus en plus souvent qu’en parlant d’éclairage nous entendons des noms de compagnies qui même aujourd’hui n’ont pas trop de contacts avec la lumière : Cisco – entreprise informatique américaine spécialisée dans le matériel réseau et, depuis 2009, dans les serveurs et les réseaux, CGI – groupe canadien (fondé au Québec) actif dans le domaine des services en technologies de l’information et de la communication et en gestion des processus d’affaires, ou des compagnies connues plus dans le domaine de la gestion et l’économie d’énergie (Distech Controls). C’est le signe d’un changement, un grand changement, peut-être plus important que l’arrivée des DEL sur le marché. Nous venons simplement de parler de la ville intelligente. Mais l’intelligence va encore plus loin. Montres intelligentes, bâtiments intelligents, vêtements intelligents (pour en savoir davantage, cliquer ici), luminaires intelligents – chaque objet deviendra intelligent. Et sera lié en réseau avec les autres objets en ce qu’on appelle l’Internet des objets(IdO) ou, en anglais « Internet of Things » (IoT).
Et voici quelques… données (on ne peut plus éviter ces mots: Internet, données…) intéressantes extraites d’une étude réalisée par McKinsey Global Institute et publiée en juin 2015 « THE INTERNET OF THINGS: MAPPING THE VALUE BEYOND THE HYPE » (L’Internet des objets : mesurer la valeur au-delà de l’euphorie). Un examen approfondi par lequel McKinsey Global Institute a cherché à comprendre précisément comment l’IdO créera une valeur économique réelle. Et leur analyse donne des résultats renversants :
- Les auteurs estiment un impact économique de 11.1 trillions (le trillion s’écrit avec 12 zéros après le 1!) de dollars par année en 2025 pour les applications de l’IdO;
- L’interopérabilité des systèmes IdO (leur capacité à fonctionner avec d’autres produits ou systèmes existants ou futurs, sans restriction d’accès ou de mise en œuvre) est extrêmement importante afin d’arriver à la valeur inscrite plus haut;
- L’usage des données pèsera aussi dans la balance – nous utilisons aujourd’hui un tout petit pourcentage des données qui sont extraites par tous les capteurs et seulement pour détecter les anomalies ou contrôler des paramètres, mais pratiquement pas pour optimiser et prédire;
- Les usagers seront ceux qui en bénéficieront le plus (McKinsey Global Institute donne l’exemple de l’amélioration de la santé globale des patients avec des maladies chroniques dont la surveillance à distance peut valoir 1.1 trillions par année en 2025);
- L’évolution de l’industrie a une autre dynamique en présence des technologies propres à l’IdO. On peut constater un mélange entre les compagnies œuvrant dans les nouvelles technologies et celles des autres industries. Par exemple, les manufacturiers d’éclairage créent de nouveaux modèles d’affaires offrant leurs produits comme service, le « light-as-a-service » en anglais. L’éclairage devient donc un service continu auquel on ajoute des fonctions non-visuelles mais qui sont facilement traduites en valeur monétaire – on parlait un peu plus haut de l’éclairage qui clignote pour faciliter l’orientation des services de sécurité. Ou, pour donner un exemple plus à la mode, l’utilisation de l’éclairage par Target (aux États-Unis): les luminaires DEL identifient la position des acheteurs et fournissent sur leurs téléphones intelligents des messages publicitaires ou des infos sur les rabais. Pour consulter l’étude de McKinsey Global Institute au complet, cliquer ici.
Bienvenue à tous dans le monde des données! Vous y êtes entré (ou vous le ferez prochainement) à l’aide de l’éclairage! Personnellement, je suis hyper-excité! L’avenir s’annonce magique car « seule notre imagination peut nous arrêter » (merci encore une fois, Isabelle Lessard)!
ndlr : 1) Les informations, idées et opinions présentées dans cette chronique sont de la seule responsabilité de son auteur, M. Mihai R. Pecingina.
2) Mihai R. Pecingina, ing., est membre de l’équipe de Consultants DND. Il est aussi président d’IDA Québec et membre du CA d’IES Montréal. On peut joindre M. Pecingina à mpecingina@dndinc.ca , tél. : 514-795-0363.
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