Plusieurs se sont demandé si l’amendement au code criminel de 2004, mieux connu sous le nom de loi C-45, allait un jour être appliqué pour le vrai. Cet amendement au code criminel prévoit la prison pour les patrons d’entreprises coupables de négligence causant des blessures sérieuses ou la mort d’employés. Voici un jugement en Ontario qui fait désormais jurisprudence : Vadim Kazenelson, gestionnaire de projet pour la compagnie Metron Construction a été condamné à trois ans et demie de prison pour négligence criminelle causant la mort; l’entreprise avait déjà été condamnée en 2012 à payer une amende de trois quarts de million, et le propriétaire de l’entreprise personnellement à une amende de 112 500$.
Quatre travailleurs sont morts et un autre très sérieusement blessé lors de l’effondrement de leur échafaudage pendant qu’ils travaillaient au 13e étage d’un immeuble en hauteur de Toronto, la veille de Noël 2009. Dès lors, l’Ontario Federation of Labor (OFL) avait lancé une campagne « Kill a Worker, Go to Jail ».
Le président d’OFL, Chris Buckley, a qualifié le jugement d’historique, tout en déplorant que ce soit un autre employé qui soit condamné à la prison et non le propriétaire de l’entreprise, lui qui a plaidé coupable à l’accusation de négligence criminelle. L’OFL entend continuer sa campagne de responsabilisation des employeurs, « jusqu’à ce que les employeurs qui mettent à risque la vie de leurs employés pour épargner quelques dollars aillent réfléchir en prison ». L’OFL regroupe plus d’un million de travailleurs, répartis dans 54 syndicats.
Notons que l’entreprise ayant fabriqué l’échafaudage reçoit aussi sa part de responsabilité et d’amende. La compagnie Swing N Scaff inc., d’Ottawa, s’est vue imposer une amende de 350 000$, et l’un des propriétaires, Patrick Deschamps, a été condamné personnellement à une amende de 50 000$.
Le projet de loi C-45, aussi connu sous le nom de « loi Westray », a été créé à la suite de la tragédie survenue à la mine de charbon Westray en Nouvelle-Écosse en 1992. Vingt-six mineurs ont alors été tués lorsque du méthane s’est enflammé et a causé une explosion. Malgré les graves préoccupations en matière de sécurité exprimées par les employés, les représentants syndicaux et les inspecteurs du gouvernement à l’époque, l’entreprise avait procédé à peu de changements, et la catastrophe est finalement survenue.
Après l’accident, la police et le gouvernement provincial n’ont pas réussi à faire condamner l’entreprise ou trois de ses dirigeants. La commission royale d’enquête qui avait été chargée d’enquêter sur la tragédie a formulé 74 recommandations en 1998. Ses conclusions (en particulier la recommandation nº 73) ont mené au projet de loi C-45.
Le projet de loi C-45, ajouté à l’article 217.1 du Code criminel est libellé ainsi :
« 217.1 Il incombe à quiconque dirige l’accomplissement d’un travail ou l’exécution d’une tâche ou est habilité à le faire de prendre les mesures voulues pour éviter qu’il n’en résulte de blessure corporelle pour autrui. »
Le projet de loi C-45 a aussi ajouté les articles 22.1 et 22.2 au Code criminel, imposant une responsabilité pénale aux organisations ainsi qu’à leurs agents pour la négligence (22.1) et autres infractions (22.2).
Pour en savoir plus sur la loi C-45 (amendement au code criminel) cliquer ici.
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