
Devant le tableau noir brossé par le plus récent État de l’énergie au Québec, l’expert en énergie Pierre-Olivier Pineau estime que le Québec est encore loin de réaliser la transition énergétique espérée. En effet, le principal constat qui se dégage du 4e exercice de l’État de l’énergie au Québec indique les Québécois brûlent plus que jamais de l’essence, achètent des véhicules plus gros et des maisons plus grandes, annulant les bienfaits de l’efficacité énergétique.
Selon les auteurs de l’étude de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal, Johanne Whitmore et Pierre-Olivier Pineau affirment que le Québec n’atteindra pas ses cibles pour réduire de 40 % la dépendance des consommateurs aux produits pétroliers et de 37,5 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. « Pour redresser les tendances, le gouvernement doit favoriser une transition vers une économie qui minimise les pertes d’énergie et améliore sa productivité », a résumé par communiqué M. Pineau.
Le rapport constate ainsi que les ventes d’essence ont augmenté de 8 % entre 2015 et 2016. D’autre part, les Québécois ont investi deux fois plus d’argent, soit près de 11 G$, pour l’achat d’un camion en 2016, que pour l’achat d’une voiture, soit 5,5 G$. Les véhicules électriques et hybrides représentent seulement 0,4 % du parc de véhicules à usage personnel. Le Québec en dénombre à peine 19 000 alors que le gouvernement espère voir rouler 100 000 véhicules électriques et hybrides sur ses routes d’ici 2020.
Pourtant, la taxe ascenseur instaurée par Jacques Parizeau au tournant des années 80 visait à décourager les utilisateurs à la pompe en appliquant la taxe de vente du Québec (TVQ) (à laquelle s’est ajoutée la TPS lors de son introduction en 1991) qui fluctuent au rythme qu’augmente le cout du pétrole brut. Alors que le Québec représente l’état le plus taxé sur l’essence en Amérique du Nord, avec cinq taxes différentes, selon Le Journal de Montréal en 2015, faudrait-il songer à introduire une autre taxe ou d’autres mesures dissuasives pour brûler moins d’énergies fossiles? Les plus âgés se rappelleront que c’est lors de l’introduction de la taxe ascenseur que les québécois ont réduit la grosseur et la voracité de leurs véhicules, jusqu’à ce qu’on revienne aux véhicules plus énergivores, en particulier les camionnettes (pick-ups), vers 2010.
Autre fait à noter, alors que le Québec consomme 195 gigajoules (GJ) d’énergie par habitant, l’Allemagne et la Norvège, qui profitent d’un climat et d’industries similaires, dépensent respectivement 113 GJ et 166 GJ.
Énergies vertes
Bien que la province jouit d’une production d’électricité propre à 99,8 %, avec l’hydroélectricité et l’éolien, ce qui lui permet d’avoir de faibles émissions de gaz à effet de serre (GES), celles-ci continuent de stagner depuis 2010, alors qu’elles devraient diminuer pour parvenir aux cibles ci-haut citées. D’un côté, les secteurs industriel et résidentiel ont réduit leurs émissions; par contre le secteur des transports a augmenté les siennes de 21 % et le secteur commercial, de 24 %. Globalement, le Québec a diminué de seulement 8,9 mégatonnes (Mt) ses émissions de 1990 à 2015.
« Devant l’ampleur de l’appétit énergétique des Québécois, que démontrent les données, il est illusoire de croire que le Québec pourra simplement atteindre ses cibles en remplaçant des sources d’énergie propres aux hydrocarbures », conclut M. Pineau.
Lors du dévoilement de l’État de l’énergie au Québec 2018, le gouvernement du Québec a annoncé l’octroi d’une subvention de 1 M$ sur cinq ans pour soutenir les travaux de recherche de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie. L’organisme gouvernemental Transition énergétique Québec, sous la gouverne du ministère de l’Énergie, s’ajoute ainsi aux dix autres partenaires de la Chaire, dont font partie des joueurs de l’énergie comme Boralex, Enbridge, ENERCON, Énergie renouvelable Brookfield et Valero, notamment.
Pour consulter le rapport détaillé de l’État de l’énergie au Québec 2018, cliquer ici.
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