La jeune pousse Audace Technologies, née à Rimouski, se prépare à l’implantation d’une minicentrale d’énergie renouvelable, dans le village Inuit de Pond Inlet dans le Grand Nord, qui servira également de centre de formation technique et d’éducation aux énergies nouvelles destiné aux jeunes Inuit. L’entreprise derrière le projet GreenCube, un microréseau visant à remplacer les génératrices diésel, entreprendra ainsi en septembre le projet Arctic Community Renewable Energy Innovation – une première au Canada, selon ses concepteurs.
L’initiative d’Audace Technologies (ATI), au cout « modeste » de 2 M$, détient un double objectif : déployer dans les villages isolés du Nord Canadien – dans le cas présent au Nunavut, où la nuit peut durer quatre mois et demi – des solutions d’énergie renouvelable afin de réduire l’utilisation du diésel, mais également générer une activité économique qui implique toute la communauté, notamment les jeunes, afin de créer des emplois tout en répondant à un besoin de formation sur le plan académique.
« ATI considère, comme d’autres experts en énergie renouvelable dans le monde, qu’il n’y a pas d’espoir de véritable développement des énergies renouvelables dans des communautés isolées si celles-ci ne sont pas totalement associées et impliquées. Implanter des panneaux solaires ou des éoliennes, même visibles, reste un mystère comme retombées réelles pour tous les habitants du village. Dans ces conditions, un tel projet n’a sans doute pas grand avenir; par contre, trouver un moyen d’intéresser toute la communauté et d’impliquer l’éducation, c’est la clé », soulève Jean-Louis Chaumel, vice-président d’Audace Technologies.
Dans l’aventure, ATI contribue par son expertise à apporter cette technologie dans les villages isolés en Arctique, partage son savoir-faire dans la gestion de projets et offre un support à la formation.
Un projet, trois volets
Le projet d’Audace Technologies se décline en trois volets : la mise en service d’une minicentrale d’énergie renouvelable, qui jouxte l’école secondaire, la création d’un centre de formation technique, avec l’installation dans la cour d’école de deux conteneurs préfabriqués mis à la disposition des enseignants, et l’arrivée d’un camion électrique, qui servira à l’approvisionnement en eau potable.
Dans le centre de formation, accessible par un corridor relié à l’école, les classes préfabriquées peintes aux couleurs vives par les jeunes, précise M. Chaumel, hébergeront le centre de contrôle de la centrale d’énergie composée d’éoliennes, de panneaux solaires et de puissantes batteries au lithium-ion. « L’apprentissage peut donc se faire sur une véritable installation industrielle. Tous types de classes et d’âge pourront fréquenter ces locaux, dotés de maquettes et autres exercices de découverte pratique ou scientifique », décrit-il.
Le camion électrique fera également figure de première technologique mondiale, puisqu’il doit fonctionner sous les -40 degrés Celsius. Le fournisseur du camion-citerne qui servira au projet-pilote n’a pas encore été choisi par la communauté inuite, qui a discuté jusqu’ici avec plusieurs fabricants de l’industrie jusqu’en Corée, affirme M. Chaumel. Celui-ci estime que « beaucoup d’entreprises à travers le monde voudraient avoir l’opportunité de tester leur camion dans de Grand Nord canadien, et démontrer ainsi ses performances ».
À ce stade-ci, deux compagnies rivalisent pour obtenir le contrat : la Sino-Américaine BYD et l’Allemande Mercedes.
Le poids lourd vert s’ajoutera à la flotte de camions d’approvisionnement en eau, et côtoiera les camions-citernes conventionnels roulant au diésel, pour prouver qu’il incarne réellement une solution concrète aux véhicules polluants.
Intérêt pour l’énergie renouvelable
« La communauté Inuit a été complètement enthousiasmée par ce volet du projet qui motive tout le monde: jeunes et moins jeunes, et leur permet d’avoir accès aux technologies dont tout le monde parle dans le Sud, a exprimé Jean-Louis Chaumel. Pour la communauté, voir ce camion vert circuler sans bruit dans les rues et livrer l’eau à chaque maison est une fierté et une révélation, en plus d’être une école pour les jeunes et les mécaniciens du village, par exemple à savoir comment réparer un tel véhicule. »
La rentrée des classes de septembre se déroulera sous le signe du renouveau pour cette petite communauté de 1 315 habitants, au nord du 72e parallèle. Audace Technologies, qui connaît ce marché du Grand Nord pour y avoir testé son projet GreenCube, aura certainement contribué à favoriser la mise en place d’un tel projet mobilisateur pour les jeunes Inuits. (Pour revoir l’article d’Électricité Plus au sujet du projet GreenCube, cliquer ici)
Bien que ce premier projet-pilote se déploie à petite échelle, Jean-Louis Chaumel et son équipe cultivent de grandes ambitions. « Il existe 80 communautés isolées, la plupart autochtones au Canada, donc le potentiel est très important. Devant l’intérêt que soulève ce type de projet, et considérant qu’il s’agit aussi d’introduire de nouvelles méthodes de formation et de création d’emplois locaux, on peut prévoir que deux autres projets de ce type devraient voir le jour dès 2018, sans qu’on sache exactement où », conclut-il.
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