Les vendeurs itinérants de panneaux solaires qui vendent du rêve – une rentabilité rapide et une production d’électricité surévaluée – ont un nouvel adversaire. Hydro-Québec a récemment mis en ligne un outil pour déjouer de telles manœuvres, qui permet de calculer le cout et la rentabilité d’une installation solaire, par rapport à la consommation annuelle. L’organisme à but non lucratif, Énergie solaire Québec, estime toutefois que ce calculateur donne un « ordre de grandeur », mais ne reflète pas nécessairement toute la réalité.
Comme plusieurs consommateurs ont porté plainte à l’Office de protection du consommateur en 2018, Hydro-Québec offre désormais cet outil virtuel afin d’informer les autoproducteurs intéressés quant aux investissements nécessaires à l’installation de panneaux solaires et les économies auxquelles il faut s’attendre sur la facture d’électricité. Sur son site, la société d’État lance le message : « ne tombez dans le panneau! »
Encore récemment, à la fin-octobre, l’émission La Facture diffusait un reportage d’enquête concernant les vendeurs de panneaux solaires qui « promettent la lune ». (Pour écouter l’émission, cliquer ici.) Le phénomène avait été révélé par Le Journal de Montréal, au printemps dernier. (Pour revoir cet article, cliquer ici)
Le magazine Électricité Plus s’est prêté à l’exercice en testant le calculateur d’énergie solaire d’Hydro-Québec. Pour l’installation de 50 panneaux solaires de 300 W chacun et en fonction d’une consommation annuelle d’électricité de 30 000 kW, calcul basé sur 1 269 heures d’ensoleillement par année, l’investissement s’élève à 45 000 $. Hydro-Québec note au passage que l’installation devra se faire sur une superficie de 81,8 m².
Dans cet exemple hypothétique, les panneaux solaires produiraient l’équivalent de 1 431 $ d’énergie. Le retour sur investissement se ferait ainsi dans 34,4 ans. L’outil estime que pour une consommation nette zéro, nous devrions investir plus de 70 000 $ et installer près de 80 panneaux. (Pour faire l’essai du calculateur, cliquer ici)
Trop pessimiste?
D’entrée de jeu, dans la section Couts et rentabilité, le site indique que « l’investissement important par rapport aux faibles économies annuelles réalisées sur la facture d’électricité représente le principal frein à l’essor de la filière solaire au Québec ». Au premier coup d’œil, on constate que les informations véhiculées versent dans le pessimisme, mais explore bien diverses facettes à considérer avant de prévoir une installation solaire.
Surtout, il donne une idée de grandeur permettant de comparer avec les dires du vendeur de panneaux solaires.
Patrick Goulet, directeur des opérations d’Énergie solaire Québec, soulève cependant quelques lacunes du calculateur. Il déplore entre autres qu’Hydro-Québec se base sur un cout moyen de 2 $ par watt. « Selon le nombre de panneaux et le temps que ça prend pour l’installation, le cout peut varier, note-t-il. Tout dépend aussi de la superficie du toit et de son revêtement. Il y a tellement de spécificités, l’outil ne tient pas compte de tous les paramètres. »
Selon les informations qu’il a récoltées auprès de ses membres spécialisés en installations solaires, M. Goulet affirme que le cout d’installation peut varier de 2 à 3 $ par watt. Une installation de grande capacité permettra de faire des économies d’échelle. « Hydro-Québec devrait moduler cette variable en fonction de la grosseur du système de production d’énergie solaire », glisse Patrick Goulet.
À noter qu’Énergie solaire Québec offre désormais un répertoire des fournisseurs en énergie solaire, que l’on peut consulter en cliquant ici.
Inflation et hausse des tarifs
Autre manque : le calculateur ne tient pas compte de l’inflation et de l’augmentation annuelle des tarifs d’Hydro-Québec régulés par la Régie de l’énergie, ajoute M. Goulet. « On n’a pas de boule de cristal qui permette de savoir à combien les tarifs d’Hydro-Québec augmenteront dans 20-30 ans », mentionne-t-il, avec une pointe d’humour. Ce dernier se dit toutefois prêt à collaborer avec la société d’État pour préciser certaines données et contribuer à mieux refléter les couts d’un tel système.
Dernier bémol, le calculateur met en garde le client que les panneaux solaires ont une durée de vie de 20 à 30 ans, alors que le consommateur récupèrera son investissement souvent après plus de 30 ans. Patrick Goulet nuance : « Les panneaux fonctionnent toujours après 20 à 30 ans. Leur productivité diminue d’environ 0,5 % par année, mais se stabilise après cette période ».
Le calculateur a en effet fait bondir quelques abonnés Facebook sur la page d’Énergie solaire Québec, qui a partagé l’information. Un commentaire mentionne notamment que la période d’amortissement prévue par Hydro-Québec diffère de l’estimation du logiciel Solargraf, un outil bien connu des installateurs de panneaux solaires, qui précise que l’investissement prendrait la moitié moins de temps à rentabiliser que ce qu’affirme Hydro-Québec.
(Pour consulter les commentaires sur la page Facebook d’Énergie solaire Québec, cliquer ici)
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