First Student, le plus grand fournisseur de transport scolaire en Amérique du Nord, a placé une commande de 260 autobus scolaires LionC entièrement électriques. Cette commande fera de First Student le plus grand exploitant d’autobus scolaires zéro émission en Amérique du Nord. Les livraisons débuteront au second semestre de 2021 et se poursuivront jusqu’à la fin du second semestre de 2023. Les autobus seront utilisés par Transco, la filiale de First Student qui opère au Québec. Il s’agit de la plus importante commande provenant d’un seul client à ce jour dans l’histoire de Lion Électrique. Pour First Student, la subvention de 150 000$ par autobus pendant la première année du programme représente 39 millions de dollars, soit 15,6% du programme de 250,7 millions annoncé par le gouvernement du Québec le 23 avril dernier. Pour les deux années suivantes, la subvention sera respectivement de 125 000$ et 100 000$ par autobus.
L’entreprise exploite déjà un certain nombre d’autobus scolaires entièrement électriques Lion. Dans le cadre de cette acquisition, l’équipe de LionÉnergie travaillera stratégiquement avec First Student pour la sélection et l’installation des infrastructures nécessaires afin que l’opérateur puisse adapter adéquatement ses opérations zéro émission.
Bonne nouvelle pour Lion Électrique : First Student voyage cinq millions d’élèves chaque jour en Amérique, transportant à elle seule plus de passagers que toutes les compagnies aériennes des États-Unis réunies. Avec une flotte de quelque 40 000 autobus et connaissant déjà bien les autobus de Lion, First Student devient un client potentiel de choix, surtout maintenant que l’entreprise québécoise aura sa propre usine aux États-Unis, où First Student est omniprésente.
Les concurrents
Les trois principaux concurrents de Lion Électrique, Autobus Thomas inc. et Girardin Blue Bird, tous deux de Drummondville, ainsi que Leeds Transit de St-Roch-de-l’Achigan, vendent des autobus scolaires électriques fabriqués aux États-Unis; sauf pour Girardin Blue Bird, filiale à 50% de Blue Bird Buses, qui assemble des minibus Micro Bird électriques au Québec depuis 2018. L’autre 50% de Girardin Blue Bird appartient à la famille Girardin, qui possède à 100% le volet distribution et service.
Cet assemblage au Québec lui permet de voir 200 de ses autobus scolaires de type C et D électriques fabriqués aux États-Unis admissibles aux subventions annoncées en avril dernier par le gouvernement du Québec bien qu’il semble que ce soit un bien petit nombre aux yeux de Girardin. Leurs minibus scolaires électriques Micro Bird sont complètement admissibles aux nouvelles subventions, mais force est d’admettre que les minibus comptent pour très peu en transport scolaire. Le secteur des ventes et du service de Girardin emploie une soixantaine de personnes et son implication directe chez les transporteurs est à l’origine de quelque 1 600 autres emplois.
La question qui se pose est de savoir pourquoi ces manufacturiers non-canadiens ne construisent-ils pas d’usine d’assemblage au Canada. Finalement, le financement/subventions accordés par le Québec s’est doté de règles semblables à celles des États-Unis qui exigent que les autobus scolaires aient un contenu à 70% états-unien. Devant ce fait et son désir de profiter de l’immense marché de nos voisins du sud, Lion Électrique a choisi d’y construire une usine qui doit être opérationnelle d’ici une quinzaine de mois. Serait-il pensable que les trois distributeurs non-canadiens s’unissent pour construire une usine au Canada en partenariat qui assemblerait leurs autobus scolaires? Difficile à concevoir, car le marché des autobus scolaires au Canada est de l’ordre de 2 500 à 3 000 unités par année, selon M. Éric Couturier, V-P ventes et marketing pour l’Est du Canada chez Autobus Thomas. Son entreprise en vend en moyenne 350 pour ce secteur comprenant l’Ontario, le Québec et les provinces de l’Atlantique. Dans l’ensemble du pays, quelque 650 autobus scolaires Thomas prennent la route chaque année. Petite question en passant : si un marché annuel de 2 500 à 3 000 autobus scolaires est insuffisant pour justifier la construction d’une usine, quelle mouche aurait donc piqué les dirigeants de Lion Électrique pour se lancer dans une telle aventure, sachant que tôt ou tard la concurrence montrera le bout du nez?
Un assemblage au Canada constituerait une solution qui permettrait d’éviter une situation de monopole, alors que seule Lion Électrique fabrique les siens au Canada. Puisque chacun d’eux vend des autobus scolaires électriques qu’ils fabriquent, ils ont les connaissances et l’expérience de par leurs usines aux États-Unis leur permettant de venir créer des emplois de qualité au Canada. Présentement, leur personnel québécois est affecté aux ventes et au service exclusivement, sauf évidemment les 600 employés affairés à construire les minibus Micro Bird chez Girardin Blue Bird. Quelles seraient les implications si Girardin Blue Bird décidait d’assembler aussi des modèles C et D des autobus scolaires à son usine de Drummondville? Chez Lion Électrique, la fabrication a été adaptée pour qu’on puisse aussi produire des minibus; l’inverse serait-il réalisable?
Girardin Blue Bird
Chez Girardin, ce sont environ 3 000 minibus qui sont construits chaque année, véhicules très majoritairement exportés ailleurs au Canada ainsi qu’aux États-Unis, le tout depuis maintenant 37 ans; cependant, moins d’une centaine électriques seulement depuis 2018, dont trois au Québec. En fait, leur usine actuelle a la capacité de produire de 3 500 à 4 000 minibus par année. Toute une longueur d’avance! Selon M. Michel Daneault, V-P Ventes et Services pour l’Est du Canada, le prix élevé de ces véhicules empêchait leur exploitation d’être rentable avant l’instauration des subventions le 23 avril dernier, car jusque-là la subvention possible était de l’ordre de 100 000$. Les subventions sont indispensables pour permettre une rentabilité. À moins que, comme ce fut le cas avec l’informatique, les prix baissent considérablement grâce à la fabrication en plus grande quantité.
Autobus Thomas, Girardin Blue Bird et Leeds Transit entreprennent une croisade pour que leurs produits soient aussi admissibles aux subventions. Girardin considère que 200 unités admissibles est insuffisant, compte tenu que l’entreprise vend annuellement quelque 450 autobus de type C et D par année au Québec; ces deux types représentent en fait plus de 80% des autobus scolaires en circulation.
Chez Autobus Thomas
Question de « tout électrique », Éric Couturier, d’Autobus Thomas, prétend que seul leur autobus Safe-T-Liner est 100% électrique, car le chauffage est assuré par un système à liquide refroidissant, contrairement à tous les autres autobus scolaires électriques qui, selon lui, seraient chauffés par un système Webasto, ou l’équivalent, fonctionnant au diesel, à raison de 3 litres/h. Selon lui, le système de chauffage au diesel est plus polluant que l’autobus lui-même, car il n’aurait pas de système antipollution. Vérification faite, les acheteurs d’autobus scolaires électriques Lion ont le choix entre ce système Webasto ou un système tout électrique; selon les informations recueillies, les systèmes Webasto utiliseraient en fait quelque 100 litres de diesel par année.
Suite à ce qui est considéré comme injuste par les trois « non-admissibles », il arrive que les couteaux volent bas. Ainsi, une dizaine de jours après l’annonce des subventions du gouvernement québécois disponibles pour les autobus scolaires électriques fabriqués au Canada, le Journal de Montréal a publié sous la plume de Jean-François Cloutier un article intitulé Faire fortune rapidement avec un fleuron Québécois, article parlant des retombées financières positives pour les actionnaires de la première heure de Lion Électrique. Un paragraphe de cet article semble avoir bénéficié d’une information soit très bien renseignée ou qui est un bruit de corridor, liant l’homme d’affaires Michel Ringuet à l’ex-ministre Pierre Fitzgibbon. M. Ringuet serait le mandataire de la fiducie sans droit de regard de l’ex-ministre et il est l’un des huit administrateurs de Lion Électrique, où il possèderait quelque 1,16 millions d’actions. Quelle est la véritable anguille sous roche? Le conflit d’intérêt ou la dénonciation? Lire l’article du Journal de Montréal. Il arrive, à l’occasion, qu’une « source » journalistique apporte une montagne d’information à un.e journaliste mais qu’en fait la dénonciation soit faite dans le but de poignarder quelqu’un à partir d’une toute petite mention. Dans l’article du Journal de Montréal, effectivement le lien Ringuet-Fitzgibbon permet de soupçonner que c’était l’objet principal de la dénonciation de la « source ».
Le commentaire transmis à Électricité Plus est à l’effet que le programme de subvention pour achat d’autobus scolaires électriques aurait été construit sur mesure pour favoriser Lion Électrique et ses actionnaires, dont l’homme de confiance de l’ex-ministre Pierre Fitzgibbon. L’appui financier de 50 millions de dollars par le gouvernement du Québec à Lion Électrique ainsi que l’aide de 50 millions de dollars également du gouvernement du Canada ne passent pas tellement bien non plus auprès de ces distributeurs, surtout qu’une partie de 15 millions serait pardonnable de la part de chaque gouvernement. Tous ces commentaires reçus indiquent qu’une guerre en sourdine s’est orchestrée contre l’ex-ministre, pour ne pas dire une guéguerre. Est-il justifié que le Québec exige que les autobus scolaires électriques soient construits au Canada, alors que le Buy American Act est encore plus protectionniste? Rappelons qu’une bonne partie des composants des autobus électriques provient des États-Unis : châssis, fenêtres, tapis, banquettes, etc.
L’achat par First Student/Transco de 260 autobus scolaires électriques directement de Lion Électrique, sans intermédiaire, coupera-t-il l’herbe sous le pied des trois autres distributeurs oeuvrant au Québec? Pas vraiment, car le transporteur américain bien implanté au Canada est ce qu’on appelle en jargon commercial un compte majeur, c’est-à-dire une entreprise qui achète directement des manufacturiers, sans passer par les distributeurs. Cependant, si le gouvernement garde sa ligne stricte que tous les autobus scolaires doivent être électriques d’ici 2035 et que seuls les autobus construits au Canada sont éligibles aux subventions, il est à prévoir que certains distributeurs devront fermer boutique. À moins que ces distributeurs arrivent à faire construire leurs autobus au Canada. Le gouvernement fédéral se montre très généreux envers les fabricants d’autobus électriques comme le prouve cette autre aide financière de 15 millions de dollars consentie à Nova Bus, de St-Eustache, le 8 juin. Une nouvelle usine d’autobus électriques au Québec, ou ailleurs au Canada, pourrait certainement obtenir elle aussi une aide appréciable. Notons que d’autres entreprises canadiennes produisent des autobus électriques de transport en commun, dont également la manitobaine New Flyer. Pourraient-elles fabriquer des autobus scolaires électriques sous licence pour les trois distributeurs présents au Québec? Ça se fait dans d’autres domaines.
La Ville de Drummondville s’implique
La Ville de Drummondville a convié les journalistes à une conférence de presse du maire et président de la Société de développement économique de Drummondville (SDED), M. Alain Carrier, pour ce matin, mardi 15 juin, à 11 h, dans la salle du conseil de l’hôtel de ville, afin de dénoncer le nouveau projet de Règlement sur les véhicules routiers affectés au transport des élèves qui vient porter préjudice à deux fleurons régionaux.
À cette occasion, il sera accompagné de représentants de la direction des entreprises A. Girardin inc. et de Autobus Thomas inc.
Chose certaine, il est tout à fait logique que les distributeurs d’autobus scolaires dont les véhicules sont construits ailleurs qu’au Canada fassent des pressions auprès du gouvernement pour que leurs produits soient aussi admissibles aux subventions : leur survie en dépend.
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