ndlr : pour plusieurs personnes, la différence n’est pas claire entre une séparation coupe-feu et un mur coupe-feu. La question est adressée au Magazine par les lecteurs à propos de la définition et des normes du code à suivre à ce sujet. Nous reprenons donc un texte publié en juin 2011 dans plusieurs médias spécialisés en électricité.
Introduction
À la suite de récentes inspections, nous constatons une augmentation d’avis de correction découlant possiblement de lacunes de communication entre les divers intervenants impliqués dans la construction d’un type particulier de bâtiment. En effet, il s’avère que même certains concepteurs (architectes, ingénieurs, technologues…) ne maîtrisent pas parfaitement les notions de « séparations coupe-feu » par rapport aux notions de « murs coupe-feu ». Cette confusion engendre assurément de graves répercussions pour les installateurs qui croient trop souvent avoir affaire à deux bâtiments distincts contigus, alors qu’il s’agit, au sens du Code de construction du Québec, d’un seul bâtiment.
Afin d’aider tous ces intervenants à éviter des correctifs onéreux, nous tenterons, à l’aide de cette chronique, d’énoncer les principes de base qui permettront de différencier aisément si l’on a affaire à un seul bâtiment ou s’il s’agit de bâtiments distincts contigus; ou au moins d’identifier l’intervenant qui pourra aider à atteindre ce but.
Définitions
Afin d’atteindre l’objectif souhaité, il est essentiel de jeter un coup d’œil attentif sur la définition des termes clés. Ainsi, le chapitre I, Bâtiment, du Code de construction définit les termes « séparation coupe-feu » et « mur coupe-feu » de la façon suivante :
« Séparation coupe-feu (fire separation) : construction, avec ou sans degré de résistance au feu, destinée à retarder la propagation du feu. ».
« Mur coupe-feu (firewall) : type de séparation coupe-feu de construction incombustible qui divise un bâtiment ou sépare des bâtiments contigus afin de s’opposer à la propagation du feu, et qui offre le degré de résistance au feu exigé par le CNB tout en maintenant sa stabilité structurale lorsqu’elle est exposée au feu pendant le temps correspondant à sa durée de résistance au feu. ».
À noter que le chapitre V, Électricité, du Code de construction (Code) aussi s’appuie sur ces mêmes définitions pour établir certaines notions. C’est d’ailleurs le cas lorsque l’on y définit le terme « bâtiment ». On établit justement, et ce, très clairement, qu’un mur coupe-feu sépare un immeuble en deux bâtiments distincts de part et d’autre de ce mur.
Aussi, le chapitre I comprend plusieurs exigences relatives au mur coupe-feu; notamment la protection contre l’effondrement, la continuité, le degré de résistance au feu requis et la surélévation des murs par rapport à la toiture.
Le degré de résistance au feu d’un mur coupe-feu doit généralement être assuré par de la maçonnerie ou du béton. Toutefois, à certaines conditions précises, un mur nécessitant un degré d’au plus 2 heures de résistance au feu peut être construit avec des matériaux autres que de la maçonnerie ou du béton, pourvu qu’il respecte les conditions suivantes :
• Il doit être protégé de façon à résister aux dommages physiques qui pourraient compromettre son intégrité;
• Il doit satisfaire aux conditions de l’article 4.1.5.18 portant entre autres sur l’effet maximal dû aux charges latérales ou à une force latérale.
De plus, on doit s’assurer que la défaillance de la paroi de protection contre les dommages n’aura pas de répercussions sur la performance du mur assurant la résistance au feu.
Interprétation
Il est essentiel de comprendre qu’un mur coupe-feu doit répondre à des exigences très précises. Il faut faire très attention à ne pas voir ces notions de façon trop simpliste. Ainsi, une connaissance appropriée des notions relatives aux critères discutés est essentielle. C’est donc le professionnel (architecte, ingénieur, ou autre) qui connaît adéquatement le chapitre I du Code de construction qui doit renseigner l’installateur. À cela, le maître d’œuvre ou l’entrepreneur général sont d’excellentes courroies de transmission de l’information nécessaire à tous les intervenants, y compris l’entrepreneur en électricité qui a, à la fois, le droit et le devoir de s’informer.
Application
Afin de revenir au concret et de discuter des cas problématiques les plus souvent rencontrés sur le terrain, prenons par exemple le cas de l’application de l’article 6-102 du Code. Selon cet article, il va de soi que s’il s’agit de deux bâtiments distincts tel que défini au chapitre I, il peut y avoir un branchement du distributeur par bâtiment. Rappelons ici que la notion de branchement du distributeur est bel et bien définie à la section 0 du Code et qu’il ne faut surtout pas la confondre avec la notion de branchement du consommateur. En effet, deux bâtiments contigus séparés par un mur coupe-feu sont considérés comme étant deux bâtiments totalement distincts. Ce n’est pas le cas s’il s’agit d’une séparation coupe-feu ordinaire.
Les cas problématiques que l’on rencontre surviennent notamment dans les immeubles à logements superposés divisés par une séparation coupe-feu où l’on retrouve deux branchements du distributeur de même tension.
Ainsi, la figure suivante nous présente deux possibilités d’un bâtiment résidentiel subdivisé ayant trois logements de chaque côté.
Le cas de gauche constitue une situation particulière. En effet, ce bâtiment ne rencontre pas les conditions de l’article 6-102 1) c) et n’est pas non plus une structure complexe au sens de l’alinéa 1) b) du même article. Ainsi, pour être alimenté par deux branchements du distributeur, ces branchements doivent provenir de deux réseaux différents comme le permet le paragraphe 1) ou avoir un mur coupe-feu entre les deux séries de trois logements pour en faire deux bâtiments distincts comme pour le cas présenté à droite. Autrement, il s’agit d’un seul bâtiment; il doit être alimenté par un seul branchement du distributeur de même tension provenant du même réseau et regrouper les six compteurs par un seul branchement du consommateur comme on le fait habituellement.
Par conséquent, il est important de déterminer le nombre de bâtiments concernés en premier lieu avant de conclure sur le nombre de branchements du distributeur qu’il sera permis d’installer.
Rappel
Rappelons que la norme E.21-10 communément appelée « livre bleu » prévoit à l’article 1.1.2 qu’à la réception du formulaire « Demande d’alimentation et déclaration de travaux », Hydro-Québec « … présumera que le maître électricien ou l’ingénieur-conseil […] aura effectué les travaux dans les règles de l’art et selon les prescriptions du Code. » Il est de plus précisé qu’Hydro-Québec ne fera aucune vérification notamment en ce qui concerne les murs coupe-feu. Cela est tout à fait normal, car il n’est pas de la prérogative du distributeur d’électricité de déterminer s’il s’agit d’un seul bâtiment ou non. L’entrepreneur a donc l’odieux d’exiger le nombre adéquat de branchements du distributeur sur le formulaire de demande d’alimentation.
Terminons en précisant que le Code exige une attention particulière à apporter lorsque, par exemple, une canalisation doit traverser une séparation coupe-feu ou un mur coupe-feu. En effet, le cas échéant, il faut s’assurer de redonner l’étanchéité souhaitée à la séparation, tel que spécifié à l’article 2-124.
Conclusion
Personne n’est mieux placé que le concepteur d’un bâtiment pour identifier clairement si ce bâtiment doit être perçu comme un seul bâtiment ou plus. Le concepteur doit maîtriser ces notions et devrait faire suivre clairement cette information afin de faciliter la distinction nécessaire à tous les intervenants impliqués. Si ce n’est pas le cas, l’installateur doit exiger que cette information lui soit fournie afin d’éviter des frais et des surprises qui sont trop souvent coûteux.
Gilbert Montminy, ing.
Responsable du secteur « Électricité »
Direction de la réglementation et du soutien technique
Régie du bâtiment du Québec