Réalité bien connue dans le secteur de l’électricité, certains panneaux électriques installés dans les années 60, 70 et 80 ont aujourd’hui des disjoncteurs qui peuvent surchauffer ou ne pas couper le circuit en cas de surcharge – ce qui pose un risque considérable d’incendie. Certains maîtres-électriciens mettent en garde leur clientèle contre les panneaux qui ne sont aujourd’hui plus vendus sur le marché, comme les marques CEB, GTE ou Zinsco-Sylvania ainsi que Commander, et recommandent de changer leurs disjoncteurs dès que possible.
Le maître-électricien Denis Lizotte, qui diffuse entre autres cet avertissement, est bien placé pour en parler. En emménageant chez sa conjointe au tournant des années 2010, il raconte avoir constaté que son panneau électrique affichait l’une de ces marques de fin de série. « Je me disais que quand j’aurais quelques minutes, je le remplacerais moi-même. Un jour que ma conjointe était seule à la maison, en plein hiver, le feu a pris », relate-t-il. L’entrepreneur-électricien H. Bélanger conseille également sur son site Internet de remplacer ces mêmes disjoncteurs.
(Pour voir ces mises en garde, cliquer ici ou cliquer ici.)
Question de précision
Si certains panneaux électriques sont moins précis que d’autres pour couper le circuit en cas de surcharge, d’autres problèmes peuvent être engendrés par la corrosion ou le comportement négligent d’un ancien propriétaire. À l’époque, il arrivait qu’on remplaçait un fusible par une pièce de monnaie. « Il arrive encore que c’est ce que l’on trouve, sur une scène d’incendie », indique un expert d’une entreprise, qui préfère conserver l’anonymat, spécialisée en investigation après-sinistre dans les domaines de l’électricité.
Cet expert refuse cependant d’identifier ces panneaux électriques comme étant particulièrement à risque d’incendie. « Certains panneaux sont plus précis que d’autres, mais même les meilleurs n’empêcheront presque jamais une possibilité d’incendie, soulève-t-il. Officiellement, les panneaux électriques sont régis par les mêmes normes et correspondent aux mêmes exigences. Les panneaux CEB – qui ne se fabriquent plus depuis 30 ans – sont à fusible, ce n’est pas le panneau qui est problématique, mais l’utilisation qu’on en fait. »
Comme dans bien d’autres secteurs, le meilleur allié demeure la prévention : nettoyer les fiches électriques, éviter de tirer sur le cordon d’alimentation lorsqu’on débranche un appareil et prévenir la corrosion dans le panneau électrique. Divers éléments peuvent nuire au bon fonctionnement des prises électriques ou des disjoncteurs : l’exposition à l’eau ou au sel, les poils d’animaux qui s’y retrouvent ou encore les fusibles mal vissés.
La cause de l’échauffement est cependant généralement due à un contact de mauvaise qualité : serrage insuffisant, corrosion, surface trop faible, etc.
Appelé à commenter le dossier, Michel Bonneau, directeur des services techniques à la Corporation des maîtres électriciens du Québec (CMEQ), indique que ces panneaux installés dans les années 60-70 ont atteint leur fin de vie utile de 25 ans. « Il n’y a pas eu de directive de les enlever, mais il y a un manque d’entretien de la part des propriétaires, commente-t-il. Ce sont des anciens modèles, il n’y avait pas eu de rappel à l’époque des certificateurs, et depuis, ces compagnies ont fermé leurs portes. »
M. Bonneau déplore que les gens soient conscientisés à entretenir régulièrement leur automobile, mais n’aient pas la même préoccupation quand vient le temps d’entretenir leurs installations électriques. « Il faut suivre les recommandations du fabricant pour savoir quand remplacer le panneau. Également, plusieurs font du bricolage dans leur panneau électrique pour économiser, ce qui n’est pas l’idéal! » Pas de surprise donc, de son côté, que ces panneaux soient à risque d’être la proie des flammes.
Près du quart des incendies
Selon le plus récent rapport La sécurité incendie au Québec, publié en 2015 par le ministère de la Sécurité publique, la défaillance ou la défectuosité mécanique ou électrique – à 23,4 % – est l’une des causes les plus probables d’incendie résidentiel, avec l’erreur humaine (24,7 %).
Le service des incendies de Grand Falls-Windsor à Terre-Neuve diffuse par ailleurs sur son site une alerte au sujet des panneaux électriques CEB de modèle MB40-10, dont ont été munies des résidences construites ou recâblées entre 1970 et 1979. (Pour trouver cet avis, cliquer ici) Par contre, aucun rappel ni avis de sécurité n’a été diffusé par Santé Canada au sujet de ces panneaux électriques que plusieurs maîtres-électriciens considèrent comme problématiques.
La photo d’introduction montre une prise électrique qui a pris feu, dans une résidence de St-Lin, à la fin aout. La prise d’origine a flanché, il s’est produit un petit arc électrique entre le courant et le neutre et, comme le panneau était défectueux, le disjoncteur n’a pas ouvert. Lentement, l’arc électrique a chauffé jusqu’à ce que de la fumée s’en dégage et qu’un incendie se déclare. Ce fait divers est à l’origine de la production de cet article.