La ministre des Ressources naturelles du Québec, Mme Martine Ouellet, a annoncé, le 5 février dernier, que le gouvernement mettait fin au programme de petites centrales hydroélectriques de 50 MW et moins et abandonnait six projets dont les étapes de réalisation étaient à un stade préliminaire. L’annonce suscite de nombreuses réactions, notamment dans les territoires et municipalités qui sont concernés par ces projets. La nouvelle provoque également l’enthousiasme de groupes écologiques, notamment l’organisme Eau Secours !, qui milite depuis longtemps contre le développement de ces petites centrales hydroélectriques.
Les six projets hydroélectriques récemment annulés par le gouvernement du Québec sont ceux de la Chute Sainte-Anne, de la Chute du Six Milles, de la Chute du Quatre Milles, de la Centrale Saint-Gabriel, de la Onzième chute et du Barrage B Manouane Sipi. « Dans le contexte actuel de surplus énergétique, Hydro-Québec économisera 24 M$ chaque année grâce à cette décision. C’est donc l’ensemble des Québécois qui seront gagnants en évitant des pertes importantes », a déclaré la ministre des Ressources naturelles du Québec, Mme Martine Ouellet.
L’abandon de ces projets a immédiatement soulevé l’indignation de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, en raison du potentiel économique qu’ils représentaient pour plusieurs communautés autochtones. Par ailleurs, plusieurs municipalités touchées par cette décision ont l’intention d’obtenir un dédommagement, même si la première ministre Pauline Marois a indiqué qu’il sera impossible de compenser les municipalités en totalité. Le gouvernement entend plutôt consulter les municipalités et les communautés concernées « afin de trouver des solutions pour soutenir des projets structurants propres à favoriser leur développement économique. »
Un comité interministériel, sous la supervision du ministre des Affaires municipales, des Régions et de l’Occupation du territoire et ministre des Transports, M. Sylvain Gaudreault, a été mis sur pied pour travailler en collaboration avec les communautés touchées. « Je m’assurerai d’entamer un dialogue constructif afin de trouver des solutions satisfaisantes pour tous, » a affirmé pour sa part la ministre déléguée aux Affaires autochtones, Mme Élizabeth Larouche.
Les organismes écologiques ont plutôt applaudi cette récente décision de mettre fin au programme de petites centrales hydroélectriques. « C’est une décision qui respecte les gens, les paysages, l’habitat et l’économie. Il est prouvé depuis longtemps que, malgré les promesses, un petit barrage, après sa construction, n’apporte que très peu d’emplois à une région, à une ville. Le tourisme est plus susceptible de mettre en valeur ces magnifiques cours d’eau », a déclaré Maryse Pelletier, vice-présidente de la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l’eau, Eau Secours ! L’organisme regrette toutefois, comme plusieurs autres, que la centrale de Val-Jalbert ne figure pas au nombre des centrales ciblées. Le site de la chute Ouiatchouan est considéré comme étant le plus beau site touristique de la région du Lac-St-Jean et l’un des plus beaux sites historiques du Québec.
Quelques semaines plus tard, la ministre Ouellet a dit remettre en question l’octroi de 700 MW d’énergie éolienne, prévus dans la stratégie énergétique 2006-2015 ; au départ, cette stratégie prévoyait la production éventuelle de 4 000 MW d’énergie éolienne. Elle a indiqué que certains appels d’offres prévus pourraient ne pas se faire. «Il devra y avoir de nouveaux projets qui se réaliseront, mais nous sommes en train d’analyser l’ampleur, et comment les choses vont se dérouler», a-t-elle affirmé. Mais comme il n’y a pas de précision, il est plausible de croire qu’il s’agissait d’une déclaration dont le seul but était de calmer les possibles critiques envers une énergie plus dispendieuse que toutes les autres et que le gouvernement encourage ; il suffit de constater que le gouvernement a donné le feu vert au projet d’éolienne de Charlevoix, dont le Magazine parlait dans sa dernière édition https://electricite-plus.com/2013/02/01/charlevoix-aura-le-plus-grand-parc-eolien-du-canada/ .
Ce qui peut sembler troublant, c’est de constater que le gouvernement veut économiser les argents d’Hydro-Québec en annulant des projets de petites centrales, et peut-être même éventuellement des projets d’éoliennes, alors que de l’autre main, il prend des engagements de développement d’énergie propre renouvelable : «le gouvernement du Québec a signé une entente de principe pour le développement au Québec d’un projet pilote de production d’hydroliennes destinées aux marchés internationaux», lors du Forum économique de Davos, en Suisse, a mentionné le bureau de la première ministre dans un communiqué émis en janvier. Comment pourrait-on s’imaginer implanter une usine d’hydroliennes et en même temps ne pas en installer sur notre territoire…
L’entente avec RER porte sur la recherche pour des hydroliennes, activées par le courant marin. «Il y a un projet d’expérimentation, de vitrine technologique qui pourrait nous permettre de produire chez nous des appareils fort intéressants pour de l’énergie verte et de l’économie verte. Boeing est le partenaire de cette entreprise. Dans les semaines qui viennent, j’aurai l’occasion de faire état exactement de cette entente de principe et de la contribution qu’apporte le gouvernement», a poursuivi Pauline Marois.
L’environnementaliste Steven Guilbeault, originaire de La Tuque, a pour sa part laissé entrevoir de l’espoir pour l’économie régionale en déclarant que la compagnie Boeing et l’entreprise québécoise RSW RER pourraient créer une nouvelle usine d’hydroliennes en Mauricie. Ces hydroliennes fonctionnent sous l’eau, donc affectent peu l’environnement visible. Mme Marois devrait confirmer le tout sous peu.
Il y a là une forme de paradoxe qui n’a que la stratégie politique comme explication… sans égards aux argents d’Hydro-Québec.
Bien sûr, les modèles d’hydroliennes qui pourraient être construites au Québec ne sont pas connus, mais cette photo nous en fait voir un modèle assez répandu.
Photo d’introduction :
La chute Ouiatchouan est l’une des plus hautes du Canada et cette photo fut prise en aout 2011, alors que le débit de l’eau atteignait un niveau rarement vu. Scène tout à fait saisissante, qui attire des milliers de visiteurs chaque année.