La filiale d’Hydro-Québec spécialisée en motorisation électrique, TM4, a été vendue à des intérêts américains, contre la somme de 165 M$, à la fin juin. Dana Incorporated est ainsi devenue l’actionnaire de contrôle de cette entreprise qui a construit sa niche dans les moteurs électriques et onduleurs. Hydro-Québec, qui forme une coentreprise avec Dana, demeure un partenaire et conserve 45 % du capital de TM4.
Fort de cette expertise en conception et fabrication de moteurs électriques, l’équipementier automobile Dana devient le seul fournisseur ayant un ensemble de ressources pour la conception, l’ingénierie et la production de systèmes de propulsion électrique. Dana se spécialisait déjà dans des technologies complémentaires de transmissions électriques et de régulation thermique pour les batteries, moteurs et onduleurs. La province québécoise voit encore son savoir-faire vendu à des intérêts étrangers.
« L’électrification des transports est à un point tournant, a expliqué Éric Martel, président-directeur général d’Hydro-Québec, dans un communiqué. Dans ce contexte, Hydro-Québec a entrepris une analyse rigoureuse visant à déterminer les conditions gagnantes qui permettront à TM4 de réaliser son plein potentiel. Cette annonce renforce la position de l’entreprise de Boucherville comme centre d’excellence de calibre international et confirme notre expertise dans le secteur. »
Il précise que cette décision d’affaires permettra d’accélérer le développement de marché pour faire de TM4 un « leader mondial » et renforcer ses activités au Québec. Dana a par ailleurs promis de conserver les 130 emplois de l’entreprise ainsi que de maintenir les installations à Boucherville. Dana s’enracinera un peu plus dans le marché chinois, puisque TM4 et Prestolite Electric Beijing exploitent en Chine une coentreprise offrant des solutions de transport propre et de mobilité électrique.
Accueil mitigé
Alors que le dévoilement de cette entente a réjoui le gouvernement du Québec, le Parti Québécois a vivement dénoncé la « perte de contrôle » de notre expertise. « Ce partenariat permettra de valoriser la technologie développée ici, au Québec, d’en assurer la croissance et d’en faire la promotion partout sur la planète, a fait valoir Pierre Moreau, ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles. TM4 est désormais bien placée pour atteindre son plein potentiel. » Il a notamment applaudi la série de droits de veto que conserve Hydro-Québec dans les décisions stratégiques touchant aux investissements, à la propriété intellectuelle, aux fusions ainsi qu’aux acquisitions.
Pour sa part, Sylvain Rochon, député du Parti Québécois et porte-parole en matière d’énergie, a soulevé l’inquiétude qu’« il n’y a aucun engagement quant à la protection [de la propriété intellectuelle]; on peut donc craindre qu’elle soit transférée à une autre filiale de Dana par une simple décision du nouveau propriétaire. Et qu’en est-il des activités de production? Il n’y a aucun engagement garantissant qu’elles seront développées au Québec. » Il compare la création de cette nouvelle coentreprise au dossier de la C Series, dont une partie des activités seront délocalisées aux États-Unis pour servir à créer des emplois en Alabama, mais surtout assurer que les compagnies aériennes étatsuniennes l’adopteront.
Interrogé sur cette transaction, Marc Bédard, président de La Compagnie électrique Lion, qui travaille en partenariat avec TM4 pour la production de l’eLionM, dit attendre d’en savoir davantage. « On nous rassure en disant que ça ne va rien changer. Il est rare de pouvoir gérer nos affaires entre Québécois, et nous voulons privilégier l’achat de composantes québécoises. TM4 offre un produit solide, et nous poursuivrons notre collaboration avec eux », a-t-il affirmé.
M. Bédard se dit en faveur de la transaction si cela peut accélérer la croissance de l’entreprise et qu’elle puisse demeurer en partie au Québec.