Le congrès sur la lumière artificielle la nuit ALAN 2015 (Artificial Light At Night 2015) a eu lieu à Sherbrooke, immédiatement après la rencontre des scientifiques LPTMM (Light pollution : Theory, Modelling and Measurments) qui, elle, a eu lieu à Jouvence, tout près de Sherbrooke, réunissant des spécialistes engagés directement dans la partie plus technique de la pollution lumineuse; le tout a eu lieu à la fin-mai.
Avec un nombre significatif de participants, environ 125 en provenance de 12 pays, la manifestation est qualifié de grande réussite.
L’ouverture du congrès de trois jours de partage d’idées et de recherches a été confiée à M. Clifford Paul, représentant des Mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse, qui a fait un lien intéressant entre l’esprit, le ciel étoilé et l’être humain; sa présentation était intitulée « La connectivité de l’esprit ». Un récit émouvant sur la grandeur de la nature, la nuit et la nuit des temps.
Qui aurait cru que la conférence annoncée comme un incontournable pour la lutte contre la pollution lumineuse aurait un contenu humaniste si intéressant et riche? Car en plus de M. Clifford, les participants ont pu assister à deux autres moments uniques et captivants. Dans la deuxième journée des travaux, Mme Marie Stewart Adams, du Parc de ciel étoilé Headlands International, de Mackinaw City, au Michigan, a capté l’attention de l’audience avec « Il était une fois… – penser au-delà du télescope et de la technologie, pour comprendre le rôle de la noirceur naturelle dans le développement des communautés »; c’était en fait une ode aux étoiles, vues par une romantique. À part les contes sur les étoiles, une remarque est restée dans la mémoire : nous ne savons plus comment nous comporter dans la noirceur.
La troisième journée a amené la conférence de Dr. Will Straw, de l’Université McGill, sur la présence de la noirceur dans le film, avec un accent sur les techniques de réalisation des films et les impacts psychologiques sur les spectateurs.
Une présence massive au congrès de l’International Dark-Sky Association, du siège social et des chapitres, a fait que plusieurs présentations ont parlé de l’activité pour la protection du ciel étoilé, mais aussi des êtres vivants qui peuvent être dramatiquement affectés par la lumière artificielle nocturne; la présentation de Scott W. Kardel portait sur l’étude et les recommandations faites par l’IDA sur la protection des tortues sur les côtes du Golf Mexique et celle Dr John Barentine portait sur le programme des espaces de ciel-étoilé.
Plusieurs conférenciers ont adressé de façon très approfondie des sujets sur les effets de la pollution lumineuse : Travis Longcore – Light pollution as global change et (à un niveau de détail vraiment saisissant); puis « Community and ecosystem responses to artificial night lighting across aquatic-terrestrial boundaries », par S. Mazeika et P. Sullivan, de l’Université d’état d’Ohio.
La partie éclairage en soi n’a pas manqué à l’appel : Mme Nancy Clanton et M. Jean-Paul Freyssinier ont parlé des problématiques du jour (comment aborder l’éclairage dans un règlement sur l’éclairage extérieur, ainsi qu’une étude de dernière heure du Rensselaer Polytechnic Institute sur la qualité de l’éclairage dans les stationnements. Quant à Mme Naomi Miller, elle n’a pas hésité à décortiquer l’impact du choix des usagers sur l’éclairage.
De l’Europe, Mme Nona Schulte-Römer a touché l’impact du public sur l’innovation dans l’éclairage, en accentuant plus la partie socio-politique du sujet. Pour sa part, Etta Dannemann a présenté le chemin du luminaire, de la table du concepteur jusqu’à sa place sur le site (From concept to product – who decides on fixtures?) et M. Salvador J. Ribas a donné un aperçu sur les impacts sociaux et économiques du ciel étoilé du parc Montsec, en Espagne.
Le programme au complet a été élaboré, de classe internationale; les participants se sont dits ravis de la qualité (et de la quantité!) des échanges.
Dans une salle voisine à celles des présentations, une mini-exposition a été réalisée par les commanditaires or de l’évènement. On avait aussi intégré les posters soumis par divers participants.
Un contenu complet qui a été marqué par deux évènements importants pour le regroupement des promoteurs du ciel étoilé québécois : M. Pierre Goulet, ancien directeur du Parc National du Mont-Mégantic, retraité deux semaines plus tôt, bâtisseur et défenseur de la Première réserve Internationale de Ciel-Étoilé au monde, a reçu de la part de l’IDA le prix de « IDA Dark Sky Defender Award » – « Gardien du ciel étoilé ». La plaque a été offerte durant la première journée par M. Scott Feierabend, le nouveau directeur exécutif de l’IDA. Dans la soirée de samedi, un autre trophée a été offert à M. Bernard Malenfant, le fondateur de l’AstroLAB, pour reconnaitre l’importance de sa contribution à la création de la Première Reserve de Ciel-Étoilé au monde. L’ « IDA recognition » a été présentée par le Président de l’International Dark-Sky Association, M. Jim Dougherty.
Et pour que l’ensemble reste vraiment inoubliable (sic…), l’autobus qui amenait les participants internationaux à l’Observatoire du Mont-Mégantic est resté en panne, au bas de la côte. La promptitude et la débrouillardise de Rémi Boucher, Sébastien Giguère (les deux du Parc National) et des autres organisateurs, ont fait que tout reste une anecdote amusante du passage de ces scientifiques au Québec.
La prochaine édition, 2016, se transporte de l’autre côté de l’Atlantique, dans le cœur de l’Europe, en Roumanie.
Bien entendu, cet article n’a pas couvert tous les sujets proposés. La plupart des présentations et la vidéo intégrale du congrès seront prochainement disponibles à l’adresse : http://artificiallightatnight.weebly.com/alan-2015–online-presentations-videos-and-posters.html
Les deux évènements avaient choisi un thème commun : Protéger l’intégrité nocturne
Les organisateurs du congrès, de g. à dr. : Johanne Roby, Martin Aubé, Olivier Domingue, Cristopher Kyba, Dietrich Henckel, Martin Morgan-Taylor.
De g. à dr. : Scott Feierabend, directeur exécutif de IDA (Internationa DarkSky Association), Mihai Pecingina, président IDA-Québec et auteur de cette chronique, et Jim Dogherty, président de IDA, l’organisation internationale.
Retraité depuis à peine deux semaines du poste de directeur du Parc National du Mont-Mégantic, Pierre Goulet, à gauche sur la photo, a reçu le prix Gardien du ciel étoilé (IDA Dark Sky Defender Award).
ndlr : 1) Les informations, idées et opinions présentées dans cette chronique sont de la seule responsabilité de son auteur, M. Mihai R. Pecingina.
2) Mihai R. Pecingina, ing., est membre de l’équipe de Consultants DND. Il est aussi président d’IDA Québec et membre du CA d’IES Montréal. On peut joindre M. Pecingina à mpecingina@dndinc.ca, tél. : 514-795-0363.