
Le Centre de recherche industrielle du Québec (CRIQ) fait peau neuve. L’institution qui soutient les efforts de recherche et d’innovation des entreprises québécoises depuis près de 50 ans entreprend un virage pour mieux s’adapter aux entreprises du secteur manufacturier, elles-mêmes en transition vers l’industrie 4.0. Le CRIQ a obtenu en aout 43,5 M$ sur cinq ans du gouvernement du Québec pour le déploiement de quatre centres de démonstration du manufacturier innovant, d’un centre de fabrication additive (impression 3D) à Québec et pour bonifier ses installations de Québec et Montréal.
« Notre transition fait écho à ce qui se passe dans le secteur manufacturier, c’est une période excitante pour les manufacturiers, qui requiert beaucoup d’adaptation et des connaissances technologiques », confie Lyne Dubois, vice-présidente au développement des affaires. Usine intelligente et numérique, robotique collaborative, fabrication additive – contrairement à l’usinage – et détection numérique avancée, il s’agit de quelques exemples de technologies de rupture qui révolutionnent actuellement le monde du manufacturier.
Cet investissement de 8,7 M$ par année qui s’ajoute à son financement annuel de 30 M$ permettra au CRIQ de revoir son modèle d’affaires et de mieux faire comprendre son offre de services pour accompagner les entreprises vers leur transition 4.0. « Nos services se déclinent en trois volets : le manufacturier intelligent, soit l’usine du futur utilisant les technologies avancées; le manufacturier conforme visant la fabrication des produits correspondant aux exigences des marchés d’exportation; et le manufacturier durable pour aider les entreprises à réduire leur impact environnemental », cite Mme Dubois.
Ces services incluent, par exemple, la valorisation de matières résiduelles avec les bioénergies et biocarburants par la production d’énergies vertes, l’écoconception de produits et procédés afin de réduire les couts de matières premières, l’automatisation des opérations et la prédiction par intelligence artificielle.
S’adapter à la production unitaire
Le virage vers l’industrie 4.0 est devenu nécessaire en raison de la demande du consommateur, qui exige maintenant des produits personnalisés et connectés, auquel il faut répondre très rapidement. Ce sont des couts additionnels pour une entreprise qui doit se réorganiser et trouver de nouvelles façons de produire tout en faisant des gains, rappelle Lyne Dubois.
Pour initier les entreprises aux nouvelles pratiques, le CRIQ a conçu une usine cyberphysique à petite échelle qui permet de comprendre le processus de fabrication qui intègre les concepts et technologies 4.0 – de la gestion de l’inventaire à l’expédition des produits – et démontre comment les industries peuvent s’adapter à la production unitaire.
Dans cette mouvance vers l’usine 4.0, le CRIQ a mis en œuvre quatre projets de centres d’expertise 4.0 en collaboration avec les organismes de développement économique locaux. Ces sites de démonstration sous forme d’antennes régionales verront le jour à Longueuil, Saint-Laurent, Drummondville et Québec dès 2018 et jusqu’en 2023. Les entrepreneurs pourront s’y rendre pour se familiariser avec les technologies de rupture, la réalité virtuelle et détection numérique avancée, entre autres.
À ses bureaux de Québec, le CRIQ a entrepris la construction d’un centre de fabrication additive (impression 3D), un procédé de fabrication qui fonctionne par l’empilement successif de couches de matière, pour la conception de pièces complexes à l’unité. Le procédé s’oppose à l’usinage, qui consiste plutôt à retirer de la matière. Ce centre, axé vers le secteur médical, vise à concevoir des prothèses (dentaires, auditives, etc.) sur mesure. Légères, elles s’adaptent à la morphologie du patient, explique Lyne Dubois.
« Il est important de mentionner que la fabrication additive ne remplace pas l’usinage, c’est un procédé complémentaire qui permet de fabriquer des pièces qu’on ne pouvait pas faire auparavant », note-t-elle.
Fleurons québécois du 4.0
Alors que les entreprises québécoises commencent à peine à réaliser la nécessité du virage 4.0, d’autres l’ont entrepris depuis belle lurette. APN, spécialisée dans l’usinage de pièces de haute précision pour le secteur de l’aéronautique, a été la première à recevoir la nouvelle certification Vitrine 4.0 du Bureau de la normalisation du Québec (BNQ), rappelle Lyne Dubois.
« Des fleurons québécois qui ont été sensibilisés et qui ont amorcé le virage étant sur le point de s’accélérer, soulève-t-elle. Nous avons de beaux exemples au Québec, par exemple, cette semaine, j’ai visité l’usine Adfast dans Saint-Laurent, qui a des procédés d’automatisation complexes. Les employés étaient tellement enthousiastes de nous expliquer leurs nouveaux outils de traitement. »
Lyne Dubois estime que le Québec a tout avantage à s’inspirer que ce qui se fait en Allemagne, où règne une volonté de l’État, qui a consacré l’expression 4.0, mais également en France, qui a baptisé ce virage industriel Usine Nouvelle, et aux États-Unis, qui a adopté la Smart Factory. L’objectif du ministère de l’Économie, de la Science et de l’innovation est d’accompagner 3 000 PME québécoises vers le virage numérique d’ici cinq ans.
Chez les manufacturiers de la quatrième révolution industrielle, exit l’image d’une usine sale et ennuyante. « Il y a maintenant de belles opportunités de carrière pour des employés qui ont des tâches à valeur ajoutée, à qui on offre des mises à niveau de compétences. On replace l’homme aux commandes de sa créativité, au cœur de l’usine intelligente. »
Sur la photo d’introduction, de g. à d., Sophie D’Amours, présidente du conseil d’administration du CRIQ, Denis Hardy, président-directeur général du CRIQ, Sébastien Proulx, ministre responsable de la région de la Capitale-Nationale, Dominique Anglade, ministre de l’Économie, de la Science et de l’Innovation et ministre responsable de la Stratégie numérique, et Patrick Huot, député de Vanier-Les Rivières, lors de l’annonce de soutien financier au CRIQ.
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