Près de 100 acteurs de la transition énergétique ont pris part au premier rendez-vous sur les microréseaux initié par le centre de recherche appliquée Nergica et la Communauté maritime des Îles, du 12 au 14 septembre, aux Îles-de-la-Madeleine. Au menu des échanges : l’émergence du consom’acteur en énergie, chaleur thermique et électrification des transports. Entretien avec Frédéric Côté, directeur général de Nergica.
« Notre évaluation de ce premier rendez-vous est très positive, exprime d’emblée M. Côté. Nous sommes heureux du taux de participation des gens et de notre programme qui tenait sur trois piliers : les microréseaux, la transition énergétique et le rôle des collectivités. » Lors de l’exposition grand public du mercredi soir, 140 personnes, dont les insulaires locaux préoccupés par la question de la transition énergétique, se sont déplacées pour visiter Des initiatives d’ici et d’ailleurs.
Parmi les sujets chauds qui ont alimenté les débats d’idées, Frédéric Côté cite notamment la montée du consom’acteur qui bientôt produira et consommera de l’énergie. « C’est nouveau cette notion d’énergie de proximité. Pour l’instant, la production d’électricité est abstraite pour bien des Québécois. Les barrages hydroélectriques sont loin, tout comme les parcs éoliens. Le modèle d’affaires va bientôt changer pour rapprocher la production du consommateur, ce qui augmentera son contrôle. »
Sur un mur à idées installé à l’occasion de l’évènement, de nouveaux projets ont été évoqués, par exemple des serres à l’énergie solaire, de nouvelles applications permettant de faire plus ou encore des initiatives de sensibilisation et d’éducation pour la population, mais également pour les décideurs. « Il s’y trouvaient des idées d’électrification de transport pour réduire les gaz à effet de serre et des projets d’optimisation de la chaleur », note M. Côté.
Dans le contexte où la technologie est en constante évolution, Frédéric Côté a évoqué l’enjeu présent qu’il faut prendre les bonnes décisions alors que les couts de production des énergies vertes continuent de dégringoler. « Nous sommes toujours surpris que les couts de production des projets solaires et éoliens diminuent. Jusqu’où cela ira-t-il? Il y a une incertitude temporelle, car une technologie peut devenir compétitive dans cinq ans.
Microréseaux c. câbles sous-marins
L’exemple des microréseaux a refait surface à plusieurs reprises alors que le projet de microréseaux sous forme de vitrine technologique en préparation à Lac-Mégantic a fait l’objet de deux conférences. La mairesse Julie Morin a parlé du projet de microréseaux d’Hydro-Québec, qui permettra à cette communauté de se reconstruire après la tragédie ferroviaire de 2013.
« Les participants ont surtout retenu le côté humain et inspirant de la mairesse, et du projet qui cumule des aspects social, environnemental et économique. Ce modèle d’affaires de microréseau de résilience connecté au réseau national d’électricité se développe aux États-Unis, et il est intéressant de voir qu’au Québec, on s’y intéresse aussi », explique Frédéric Côté. Ce modèle propose ainsi de diminuer les couts de transport de l’électricité, mais également de renforcer le réseau électrique.
Les Îles-de-la-Madeleine attendent également leur microréseau, mais un projet de câble sous-marin flotte dans l’air – Hydro-Québec ayant entamé des études pour relier le milieu insulaire à partir de la Gaspésie. Sans oublier qu’un projet éolien de 6,4 MW d’énergie doit voir le jour d’ici la fin 2019, dossier qui ne fait pas l’unanimité auprès de l’Association madelinienne pour la sécurité énergétique et environnementale (AMSÉE), qui doute de la pertinence des éoliennes, alors que le projet de câble sous-marin semble s’imposer.
(Pour lire l’article de Radio-Canada au sujet de cette opposition au parc éolien, cliquer ici.)
« Tous ces projets seraient intégrés, ils ne s’excluent pas, stipule pour sa part M. Côté. Le parc éolien sera en exploitation six à sept ans et aura un impact significatif sur la réduction de la centrale thermique, avant que le microréseau s’installe, deux à trois ans plus tard, et que le câble sous-marin soit branché, en 2025. »
Un article de La Presse mentionnait récemment que l’avenue d’un microréseau avait été envisagée par Hydro-Québec à l’Île d’Orléans puisque les câbles sous-marins ont atteint leur fin de vie utile et doivent être changés. Toutefois, cette option a été jugée trop couteuse par la société d’État, qui entrevoit maintenant de remplacer ces câbles. (Pour consulter cet article, cliquer ici.)
« Ce scénario a été évoqué, mais aucune étude économique ne prouve que cette option est plus couteuse, commente Frédéric Côté. Il n’y a pas eu de démarche sérieuse, et j’ai l’impression que ce scénario a été bâclé. Cet article m’a laissé dubitatif. Sur le principe, oui, ç’aurait été une occasion à saisir, mais s’il y a urgence de remplacer le câble, la participation citoyenne est moins propice. Il est important de considérer l’enjeu humain. Le projet doit se faire avec la collectivité. »
Quant au rendez-vous sur les microréseaux, l’évènement reviendra affirme avec certitude M. Côté. Dans un an, peut-être deux. Il pourrait également se tenir ailleurs. Peut-être à Lac-Mégantic. « Il est certain que nous tenons à nous coller sur l’actualité », conclut Frédéric Côté.
Sur la photo d’introduction, les participants visitent la centrale thermique des Îles-de-la-Madeleine dotée de six moteurs de 11 000 kW permettant d’alimenter 13 000 résidents de huit localités.