
Bien que le premier ministre François Legault l’ait mis sur la glace pendant sa campagne électorale de 2018, le projet de parc éolien Apuiat est enclenché aujourd’hui. M. Legault disait alors qu’Hydro-Québec aurait des surplus pour les 20 prochaines années. Le vent a changé de direction et le parc éolien des Premières Nations québécoises innues, qui en sont copropriétaires, va de l’avant. À peine 28 mois après la prise de position de la CAQ de François Legault.
Non seulement M. Legault appuyait la recommandation d’Hydro-Québec à l’époque, mais il se trouvait à soutenir du même coup la thèse des surplus évoquée par plusieurs opposants à la construction du complexe La Romaine. On disait alors que c’était gaspiller l’argent des Québécois que d’investir en électricité à ce moment-là.
Dans un article publié lors de la mise en branle du projet La Romaine, Électricité Plus mentionnait qu’au cours des 50 années précédentes, Hydro-Québec avait su bien prévoir les besoins en électricité des Québécois et que le développement de la filière électromobilité était peut-être sur le point d’évoluer rapidement. Et lorsque les critiques ont abondé dans le sens des surplus inutiles, le magazine mentionnait qu’au contraire les surplus d’électricité serviraient grandement au développement industriel du Québec.
Voilà donc le Québec rendu avec d’excellents contrats d’exportation, de l’électromobilité qui connait une forte croissance (autos, REM, camions lourds, autobus scolaires), et de l’industrie de l’hydrogène qui donne des signes de développement à court terme. L’hydrogène peut d’ailleurs devenir une importante industrie au Québec, avec des emplois payants. Le tout au moment même où ce même gouvernement fait des acrobaties pour développer des projets et services favorables aux Premières Nations, ce qui est très louable en soi.
Le projet Apuiat s’inscrit directement dans la vision du gouvernement pour la relance économique du Québec, en s’appuyant sur la transition énergétique dans une perspective de réduction des gaz à effet de serre (GES). Dans ce contexte, une demande croissante d’électricité est à prévoir, en raison du déploiement du Plan pour une économie verte (PEV) en plus des projets d’exportation d’électricité vers les États-Unis et les provinces voisines. De surcroit, la nouvelle mouture de l’entente permet une réduction du prix de l’électricité de 17 % par rapport à celle présentée en 2018.
Un projet historique pour les Innus
L’entente conclue porte sur la signature d’un contrat de 30 ans pour l’achat d’électricité qui sera produite par le parc éolien Apuiat. Le contrat entre Hydro-Québec Production et Parc éolien Apuiat S.E.C., une société regroupant les neuf communautés innues de la province, et la société Boralex, prévoit que l’électricité sera achetée au cout d’environ 6 cents/kWh. Apuiat devient donc le parc éolien offrant le cout par kilowattheure le plus compétitif de tous les parcs éoliens sous contrat au Québec.
Le parc éolien sera aménagé sur le territoire traditionnel des Innus de Uashat mak Mani-utenam et les terres publiques de la ville de Port-Cartier. La construction débutera en 2022 et créera 300 emplois. Les turbines devraient commencer à tourner en 2024, ce qui assurera une dizaine d’emplois permanents.
Le chef de la communauté innue de Uashat mak Mani-utenam, Mike Mckenzie, a déclaré qu’«Apuiat est le fruit d’une idée innue, un désir de construire une richesse collective. Pour la première fois, à l’échelle de notre nation, nous sommes les maitres d’œuvre d’un grand projet au bénéfice des Innus et des Québécois. Ce projet nous aidera à entreprendre un dialogue et à bâtir une interdépendance, plutôt qu’à entretenir la dépendance. La route vers la réconciliation doit se faire par l’inclusion économique des Premières Nations et par la création d’opportunités pour les générations actuelles et futures. C’est ça, aussi, reconstruire une relation de gouvernement à gouvernement, de nation à nation. L’histoire s’écrit au présent, et cette histoire, nous l’écrirons ensemble: Innus, Nord-Côtiers et Québécois.»
Pour sa part, Martin Dufour, chef du Conseil des Innus Essipit, a dit qu’«Apuiat, c’est plus qu’un projet éolien: ce sont des revenus, pendant 30 ans, pour nos communautés et un vent de fraicheur pour l’économie de la Côte-Nord. C’est aussi l’opportunité pour chacune de nos communautés d’investir, de manière autonome, dans ses propres priorités. Les Innus ont le potentiel et la volonté de participer au développement économique du Québec et nous avons beaucoup à offrir. Bien qu’Apuiat soit notre premier projet national, ce ne sera certainement pas le dernier.»
Quant à Sophie Brochu, présidente-directrice générale d’Hydro-Québec, elle a ajouté «[que ce projet] marque aussi une étape importante, dans nos relations avec les communautés innues, et témoigne de notre volonté d’être à l’écoute des ambitions des Autochtones».
Faits saillants
- Le mot Apuiat représente, en innu aimun, une rame, soit un symbole qui signifie d’avancer ensemble dans la même direction.
- Le parc éolien d’environ 200 MW sera construit sur le territoire traditionnel (Nitassinan) de la Première Nation de Uashat mak Mani-utenam et sur les terres publiques de la ville de Port-Cartier, dans la région de la Côte-Nord.
- Les communautés innues et Boralex sont partenaires à 50-50 dans le projet. Les partenaires se partageront à parts égales les profits générés par la vente d’électricité pour toute la durée du contrat.
- La communauté d’Uashat mak Mani-utenam et la Ville de Port-Cartier recevront chacune une redevance annuelle pendant toute la durée de vie du projet, à titre de communautés d’accueil.
- Le projet éolien Apuiat créera environ 300 emplois pendant la construction, et environ 10 emplois permanents pour l’exploitation du parc.
- Le début de la construction du parc éolien est prévu à l’été 2022, et la mise en service, en décembre 2024.
- Les partenaires du projet reprendront la démarche d’information publique au cours du mois de février. Des rencontres virtuelles avec différents groupes d’intérêt de la région et des séances d’information publiques virtuelles seront organisées dans les prochaines semaines.
- La signature de ce contrat n’aura aucun impact sur les tarifs d’électricité pour les clients d’Hydro-Québec.
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